On parle beaucoup de fraude ces dernières semaines, après avoir beaucoup glosé la dette, suite à l’affaire « Wikileaks » – par laquelle a été révélée une liste de fraudeurs au fisc potentiels. Les gros fraudeurs ont trouvé en Thierry Afschrift un défenseur particulièrement complaisant, un de ces « experts » qui pullulent dans le café du commerce médiatique. Avocat fiscaliste, membre de la Ligue des Contribuables (dont il est inutile de demander le programme), professeur à l’ULB, M. Afschrift est de ceux qui pensent que la lutte contre la fraude fiscale est une « chasse aux sorcières » ou encore que l’harmonisation fiscale au sein des pays membres de l’union européenne est une « arnaque » (pour le contribuable). Sans craindre le moins du monde le grotesque, il aime à se profiler comme un « indigné », version Harpagon : « Nous aussi, nous sommes des indignés ! […] Indignés par la pression fiscale ; indignés par le contrôle étatique sur presque toutes les activités, par les réglementations et la régulation omniprésentes ; indignés par une politique monétaire publique qui appauvrit tout le monde; indignés par l’État tout simplement. » Dans Le Soir (18 avril 2013), cette autorité brouilleuse de sens y rompt une nouvelle lance : la fraude, pour l’essentiel, c’est de la petite fraude. Comme cela paraît difficile à avaler, M. Afschrift s’appuie sur des « études » universitaires qui prétendent que les sommes cumulées des petites fraudes dépassent celles de la grande fraude fiscale. Le restaurateur qui ne donne pas la souche TVA. Les petits travaux de plomberie sans facture. La femme de ménage non déclarée. Les heures supplémentaires au noir. On croirait entendre le personnage de Claude Brasseur dans « Signes extérieurs de richesse »[ref]Film de Claude Monnet, sorti en 1983.[/ref] : nous sommes tous des fraudeurs à la petite semaine ! Cet écran de fumée conceptuel a pour unique but de faire dévier le regard des gros poissons. Si nous sommes tous des fraudeurs, personne n’a intérêt à ce qu’on s’attaque à la fraude, puisque tout le monde en profite. De toutes façons, dans l’idéologie libérale, ce n’est jamais la faute des contribuables, c’est l’impôt le problème.